samedi 17 décembre 2011

Chapitre 18


Enfin les vacances. Après cette rude semaine de massacre, je peux enfin me reposer...

Je rentre chez moi, mon père est déjà là.

« Mon boss a trouvé un prétexte ignoble pour me renvoyer. Je ne suis pas assez motivé pour travailler, contrairement à ce que dit le roman de motivation que je lui avais laissé il y a quinze ans, au moment d'entrer dans sa boîte. Qu'est-ce qu'on va faire, maintenant ? »

Trop âgé pour commencer une carrière. Trop détesté par l'administration pour percevoir une quelconque aide ou allocation. Il n'a désormais plus de revenus.

Je retourne en précipitation au lycée, annonçant ma démission. Je ne peux plus étudier, il va falloir que je trouve un travail au plus vite pour avoir un espoir de toucher un peu d'argent, sans avoir d'expérience, et avec un marché du travail prisé par des millions de chômeurs.



Coup de chance énorme, un autre ami ''m'embauche'' pour faire ses devoirs à sa place. Il me paie dix euros par devoir-maison. Rapidement, d'autres responsables de clans de mon ancienne classe ont la même idée que lui. Au final, je touche en moyenne une quarantaine d'euros par devoir recopié plusieurs fois, Marc et Blanche me défendent face aux mauvais payeurs qui se manifestent parfois. Sur une classe de trente élèves, on note trois copies différentes, vu que chaque responsable de clan transmet le devoir à ses amis respectifs. Les professeurs risquent de ne pas être dupes, et le conseil de classe ayant lieu après les vacances devrait être électrique avec si peu de différences entre les copies.

Rien que pour les devoirs de ces ''vacances'', je gagne au total deux cents euros. Pas suffisant pour vivre décemment, mais c'est toujours ça de pris. Mon père est horriblement gêné de me voir arrêter les études pour ça, et passe chaque jour au Pôle Emploi pour tenter d'abréger cet acte, sans succès.



Un jour, en revenant de chez Marc, je croise un grand homme, haut de deux mètres, entièrement recouvert d'un drap noir, laissant simplement une ouverture au niveau de son visage. Un problème majeur se pose : on ne voit pas le-dit visage, simplement une ombre noire. Il paraît presque fantomatique.

« Toi !

Jamais je n'avais entendu une voix si ténébreuse. Je me retourne pour voir s'il ne parle pas à quelqu'un d'autre. En voyant qu'il n'y a personne d'autre dans la rue, j'obtiens ma réponse. Hésitant, je réplique.

    • Euh... moi ?
    • Oui, toi. Pourquoi exprimes-tu la joie ?

Impossible de deviner des formes humaines, il est immobile.

    • Hein ?
    • Ce n'est pas compliqué comme question ! À quelles occasions exprimes-tu de la joie ?
    • Qui êtes-vous ?
    • Réponds à ma question : pourquoi es-tu heureux ?
    • Ça fait déjà trois questions différentes, vous savez.
    • LEUR SENS EST LE MÊME !
    • Wolfgang Ulrich, c'est toi ?
    • Tu connaissais le grand Belto ?
    • Ah, vous connaissiez son pseudonyme ?
    • C'EST MOI QUI POSE LES QUESTIONS ICI !
    • Au temps pour moi, continuez.
    • Attends un peu, tu sais que Belto est son pseudonyme. Seuls les Mikava et les Migono sont susceptibles de le connaître. Donc, tu es un Mikava, car les Migono dont je fais partie connaissent ma nature, et toi non.

    • Donc, je dois te bousiller la gueule ?
    • Tu n'as toujours pas répondu à mes questions.
    • Franchement, vous pensez qu'en étant heureux, j'aurais été recruté par les Mikava ?
    • Ils t'aveuglent, ils te font croire qu'ils peuvent changer ta vie et te rendre heureux. C'est faux.
    • Ce n'est pas vrai.
    • Je viens de le dire.
    • Non, je disais que vous racontez des noises. J'ai déjà des résultats, je me suis fait des amis.
    • En jouant aux fléchettes ? Ils t'apprécient juste parce ce que tu joues bien d'après eux, même si tu ne ferais pas le poids en championnat. Tape trois coups à côté de la cible et ils te délaisseront.
    • Qu'est-ce qui me le prouve ?
    • Les faits, mon jeune ami. Ils n'ont pas besoin de toi. Ils se montrent simplement amicaux parce que tu pourrais leur servir en guise de remplacent pour les tournois.
    • Vous venez de dire que je ferais pas le poids.
    • L'un n'empêche pas l'autre. Aveuglés par un talent qu'ils n'ont jamais vu, ils te pensent invincible, mais il y aura toujours bon nombre de personnes meilleures que toi.
    • Attendez une minute. Vous essayez pas de me pervertir à la cause des Migono en me déprimant, par hasard ?
    • Nous te recruterons à ta juste valeur, ne te donnerons pas de faux espoirs. Si tu as une mauvaise opinion du monde, tu pourras l'exprimer librement, sans qu'on te force à être plus joyeux. Mieux, on te permettra de diffuser cette opinion, pour permettre à d'autres d'ouvrir les yeux face aux faits !

J'enfile mon armure Mikava, dégaine ma lame.

    • Tu veux me tuer ? Faire triompher la dictature de l'optimisme ? Vas-y seulement, nourris le despotisme ! Répands le bonheur, et le monde courra à sa perte !

Au moment d'abattre un coup fatal au spectre, celui-ci se dissout intégralement. Disparu. Plutôt étrange comme Migono, Sarantu ne m'a jamais parlé d'hommes en noir. Je lui demanderai ce que c'est ce soir.

Je m'approche de la maison, quand je vois un autre homme en noir, semblable au précédent, fuir en passant par une fenêtre. Il me remarque, mais se dissout également. Que faisait-il chez moi ?



Une réponse me vient. Horrifié, je me précipite vers mon domicile.

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