samedi 21 janvier 2012

Chapitre 20


Un son étrange se fait entendre, comme sorti d'un instrument de musique. Une mélodie lente au piano suit. Entêtante, facile à mémoriser. Puis des notes électroniques, puis des rythmes. Cela ressemble un peu à la musique qu'écoute Marc, en moins violent.
Des points de lumière se dessinent dans un fond noir total, sur le rythme des notes jouées, soudainement sourdes, puis revenant à un niveau normal. Ces points forment un planisphère, décrivant les côtes terrestres en rayons lumineux. Puis il commence à défiler devant mes yeux, à se tordre. Les points s'intensifient avec certaines notes.
Puis la carte se forme en un globe, sur la mélodie jouée au synthétiseur. Les couleurs sombres du monde s'affichent, je crois voir un véritable globe terrestre sans nuages tourner devant moi, la musique devient plus intense. Soudain, je me retrouve à voyager à quelques kilomètres de la surface de ce globe. Je vois des paysages de nuit, de l'Europe, de l'Asie, de l'Afrique... comme si je volais.
La musique change de tonalité, la mélodie se tait, et des notes plus oppressantes se font entendre. Je suis maintenant dans un amas de nuages, toujours en mouvement, comme volant à l'intérieur. Des éclairs se forment avec les notes. J'ai l'impression d'être dans un tourbillon. Les notes sont toujours plus dures, les éclairs sont en rythme et plus nombreux. Je redescends, et constate qu'ils s'abattent par milliers à la seconde sur les paysages vu tout à l'heure.
La musique est soudain jouée sur un clavecin, je constate un désastre sur Terre, tout s'enflamme au fur et à mesure. Puis la mélodie est rejouée plus calmement, avec plusieurs synthétiseurs l’accompagnant, jouant de manière plus anarchique, mais toujours plus mélodieuse. Je suis à nouveau happé au-dessus des nuages, qui se dispersent peu à peu, comme aspirés sur Terre par les éclairs, se déchaînant au rythme de la musique, encore plus dur. Ils cessent, je revois le globe dans son ensemble, complètement en feu, la musique est stressante.
Une voix se fait entendre, je n'en comprends pas les mots. Je constate une série d'explosions à la surface de ce globe, toujours en rythme avec la musique, angoissante. Puis je vois la Lune, comme si elle se décrochait de son orbite, et fonçait sur la Terre. Quelques sons persistent de cette musique, avant qu'elle ne reprenne de plus belle, la mélodie presque marginalisée. Une ombre géante se prolifère à la surface de la Terre, celle de la Lune. La musique paraît soudainement ''scratchée'', et le satellite percute sa planète à ce moment. La musique panique. Le globe implose littéralement, certains de ses morceaux ont plongé dans son noyau, maintenant apparent. Je m'éloigne, et la musique s'affaiblit.
Soudain, je vois Obero. À sa surface jubilent des Migono. J'entends un solo de guitare électrique plutôt puissant accompagner cette fichue mélodie au synthé. L'ensemble est plutôt lent et triste. Les Migono se réjouissent devant la vision d'apocalypse offerte. Puis j'arrive au-dessus d'Anuva, où les Mikava s'affolent devant cette même vision. La musique et tous ses instruments retiennent une même note, et je vois une horde de Migono foncer vers Anuva en jet-pack, lames dégainées. Les Mikava s'arment à leur tour et résistent tant bien que mal à l'assaut surprise. Mais rapidement, il se trouve que les orangés sont bien plus forts que mes collègues. J'assiste à la scène en témoin inactif, à un massacre général de Mikava. Jonchent également des Migono au sol, mais très peu. La musique décrit plutôt bien l'ensemble : épique mais affreux.
Je vois le sommet de l'académie. Un Mikava blanc défie à la lame un Migono noir, je déduis que c'est un combat entre Maradu et Feltro. Le solo de guitare s'accélère. Les deux bretteurs sont de talent. Les instruments s'emballent, les coups sont donnés à une rapidité démente. Mais Feltro transperce Maradu de part en part à l'aide de son arme, celui-ci chute et s'écrase contre le toit du niveau vert. La musique va crescendo, je suis propulsé hors de la zone, qui n'est plus qu'un point lumineux disparaissant dans l'ombre infinie. Les instruments se taisent. Il n'y a plus rien.

J'allume brusquement la lumière. Mon lit adoptif est trempé de sueur. Je comprends. C'était un cauchemar, affreusement réaliste.
Je me lève vers huit heures et me dirige vers mon ancien domicile, pour creuser la tombe de mon père. Toujours en larmes, je peine à l'effort, mais je ne peux le laisser ainsi. Marc arrive, un nouveau cercueil avec lui. Il me laisse seul me recueillir devant les trois membres de ma famille, les seuls que j'aie connu. On ne m'a jamais parlé de possibles oncles, tantes, grands-parents. Sans Marc et sa famille pour m'héberger, je n'ai aucun autre endroit où aller. Je ne peux pourtant pas rester éternellement chez eux, abuser de leur hospitalité. Cela ne les gène peut-être pas, mais moi si. Je n'ai pas d'autre choix que de l'accepter.

Un jour, Marc se précipite vers moi dans la rue.
« Tu tombes bien, viens vite, il y a trois Migono qui circulent dans la rue à côté ! Y'a personne en plus, on peut se changer discrètement. »
En effet, je vois à mon tour deux Migono sombres accompagner un Migono conventionnel. Nous allons à leur rencontre en armure Mikava, lames en évidence. Le Migono conventionnel se dénomme Perebro et paraît surpris de nous voir.
« Tiens ! Ardamu ! Tu circules par là toi aussi ?
    • Euh... on se connaît ?
    • table ! HA HA HA !
    • Non, pas toi.
    • Si, moi.
    • Dis, Ardamu, et si tu m'expliquais ?
    • Ce guignol est Garatu, ton prédécesseur parmi les élèves de Sarantu. Porté disparu depuis plusieurs semaines, il semblerait qu'on l'ait retrouvé. Reconnaissable entre mille à cause de blagues idiotes qui lui ont donné une sale réputation.
    • Chouette, et les deux fantômes à côté, tu les connais aussi ?
Garatu nous coupe.
    • Ce sont deux nouveautés. Après la mort de Belto, Feltro a jugé qu'un Migono seul cumule difficilement les fonctions de guerrier et de recruteur. Mes deux collègues ici présents peuvent se battre, mais sont plutôt spécialisés pour influencer les autres. Ils ne sont pas humains initialement, n'ont pas de pseudonyme de Migono et peuvent se téléporter facilement s'ils sont menacés. Ce sont des créatures de cauchemar produites à la chaîne pouvant apparaître aux yeux de tous les Hommes pour les déprimer et les rallier à notre cause, s'ils ne se donnent pas la mort avant. Mais d'après les rapports, je crois savoir que tu sais déjà ça, Ardamu.
    • Je t'emmerde.
    • Des insultes ? Intéressant. Je crois que tu voues une haine trop importante envers les Migono pour les rallier. Il faudra donc te tuer. Si ton ami est fidèle, il te rejoindra. »
Les toges noires révèlent des armures aux reflets violets. Les trois Migono dégainent et se tiennent prêts pour le combat.

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