samedi 7 janvier 2012

Chapitre 19


Ce type de Migono doit être envoyé pour faire déprimer les gens. Si l'un d'entre eux a vu mon père, déjà abattu...
Ma crainte se confirme, la situation était déjà difficile, elle est devenue immorale.
Je retrouve mon père un couteau de cuisine en mains... et la lame du couteau fichée dans sa poitrine.

Malheureux, pleurant à chaudes larmes, je sors mon nœud coulant, mais en voulant l'installer, une main me retient, venue d'une porte de transition entre deux mondes.
« Ne fais pas ça.
    • Je ne supporte plus cette situation ! Tous mes proches meurent autour de moi ! Je ne veux pas souffrir plus !
    • Tu n'es pas devenu mont élève pour que tu te pendes si près du bonheur. Je comprends que tu sois malheureux après la mort de tes parents, mais ce n'est pas une raison pour t'autodétruire ! J'ai déjà perdu assez d'apprentis sans avoir été là pour les sauver à temps. Maintenant que j'arrive au bon moment pour empêcher une mort, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour mener ma volonté à terme !
    • Comment peut-on être heureux en étant orphelin si tôt ? Aucun foyer ne m'acceptera, je ferai la manche dans la rue pour rien ! Quitte à crever, autant mettre en application le plan que j'ai depuis des années !
    • Viens sur Anuva, on peut en discuter plus calmement. Lâche cette corde, maintenant !
    • Peuh... Anuva. C'est pas un endroit pour vivre.
    • Moi, je veux bien t'accepter chez moi. »
Une troisième voix venait de retentir, c'était Marc. Pendant les vacances, il m'apporte des comics. La porte était ouverte, il est brièvement entré pour déposer sa marchandise, mais il a vu mon père mort, m'a entendu pleurer, a tout de suite compris, et est venu dans ma chambre.
« Ma grande sœur est dans la vie active, maintenant. Nous avons une chambre de libre pour te loger, et suffisamment de moyens pour te nourrir.
    • Je serai un poids pour vous !
    • Mes parents sont plutôt cléments, et ravis quand ils voient qu'un ami vient à la maison. Auprès d'eux, je saurai défendre la situation, compte sur moi. »
Médusé face à la proposition plus que généreuse de mon ami, je prends un temps de réflexion. Pendant ce temps, Marc téléphone à ses parents, demandant si je peux rester dormir chez lui. Ils répondent positivement. En raccrochant, il esquisse un sourire, et se justifie en disant qu'il n'a pas précisé combien de fois j'allais ''rester dormir''. Je le laisse préparer un discours persuasif pour ses parents, et suis Sarantu sur Anuva. Ayant congé, le chevalier choisit de m'accorder une part de son temps libre. Je lui parle de ces Migono en habit noir, et il approuve ma théorie.
« En effet, je n'avais jamais entendu parler de ça jusqu'à présent, mais ton raisonnement se tient. Ces fantômes noirs risquent d'être très dangereux.
    • Mais... comment mon père a-t-il pu voir le Migono ?
    • Théoriquement, un Mikava peut se rendre visible aux yeux de tous. Un programme spécial le permet, mais il est réservé aux chevaliers chargés de recruter les apprentis, et grades supérieurs. C'est grâce à ce programme que tu as pu me voir le premier jour. Ce ne serait pas étonnant si les Migono avaient trouvé un programme similaire.
    • Même un apprenti pourrait coder ce truc, et le transmettre à un Migono qui l'aurait convaincu.
    • Impossible, il faut utiliser certains termes de programmation que les apprentis ne doivent pas connaître, en principe.
    • Admettons. Mais leur but n'est-il pas de recruter plutôt que de provoquer des suicides ?
    • Ce que ce Migono noir t'a raconté aurait pu pousser au suicide des personnes avec moins de répartie, ou moins convaincues de leur bonheur. Ils doivent faire tout leur possible pour faire déprimer un maximum leur interlocuteur, de manière à l’appâter plus facilement, mais cela peut facilement aller trop loin... »
Encore sous le choc, je préfère rapidement rentrer chez moi.

Le soir, ayant rassemblé le peu d'affaires que j'avais, je retrouve Marc chez lui. Ayant expliqué la situation à ses parents, ceux-ci m'accueillent à bras ouverts.
« Bienvenue chez nous, Igor. Tu peux rester ici autant de temps que tu le souhaites.
    • Merci, madame. Mais je voudrais pas déranger.
    • Du tout. Nous comprenons ton malheur, et sommes prêts à t'héberger jusqu'à ce que la situation s'améliore.
    • Merci... Merci beaucoup. »
Je prends place dans l'ancienne chambre de la sœur de Marc. C'est... rose.
« Ne t'en fais pas pour la déco, d'après ma sœur, on s'y habitue. Elle travaille à l'étranger, et on la voit peu. Si jamais elle revient ici passer une ou deux nuits, peut-être plus, on avisera.
    • Pas grave pour la déco. C'est déjà super de m'aider, je devrais pas accepter, c'est trop.
    • Meuh non, c'est humain. »

Je me couche en pleurant, pensant à mes parents. Ils sont de toutes façons mieux là où ils sont. Mais sachant que j'étais encore en vie, pourquoi mon père s'est suicidé ? Pourquoi m'a-t-il abandonné ?
« Il voulait peut-être pas être un poids pour toi. Il aurait pas retrouvé de boulot, et toi, tu ramenais un peu d'argent. Plutôt que de nourrir deux bouches, dont une condamnée à l'inactivité jusqu'à la fin de ses jours, il a préféré faire en sorte que tu gardes le plus d'argent pour toi.
    • Marc, tu lis dans mes pensées ?
    • Tu penses à voix haute, et je t'entends parler jusque dans ma chambre.
    • Mince, désolé, je pensais pas être si bruyant.
    • Pas grave, tu déranges pas.
    • Bah si, quand même.
    • Meuh non.
    • Au fait, merci pour ton explication, ça donne un début d'idée... Mais t'as toujours eu une force de déduction comme ça ?
    • Ouep, et c'est un sacré avantage. »

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