samedi 18 février 2012

Chapitre 22


Je me permets une petite pause dans mon ''travail'', pour me balader et me changer les idées. Hélas, l'extérieur est toujours aussi moche, la pluie et le ciel gris dominent un Villanbourg morne et peu accueillant. Les journaux font leur une sur l'augmentation du taux de suicides, on dit que d'étranges fantômes noirs auraient été aperçus auprès des...


C'est bien plus gros que ce que je pensais, alors.
Je profite de la gratuité de l'un de ces journaux pour m'en procurer un. Je m'abrite pour le lire sans avoir à l’essorer à chaque page, et je constate les faits. On recense des dizaines de milliers de cas tout autour du monde, un corps est retrouvé sans vie, le propriétaire a laissé des indices prouvant qu'il a fait ça tout seul, testaments, évidences... La description des fantômes noirs colle en tout point avec celle des Migono non-humains.
« C'est inquiétant tous ces morts...
Brusquement, je me retourne, surpris par la voix m'ayant coupé dans ma lecture.
    • Blanche ? … Quelle surprise ! Ça va ?
    • Et bien non, je vais pas me réjouir de ça...
    • Au temps pour moi, j'avais la tête ailleurs.
    • C'est rien. Cette histoire me fait peur. J'espère que je tomberai pas sur un de ces fantômes... Qui dit que ce ne sont pas eux qui tuent et maquillent ça en suicide après ?
    • Faudrait être fort quand même.
    • Et bien, je croyais pas aux fantômes avant, et au vu des événements, je crois que je vais modifier la conception de la frontière du raisonnable que je me fais...
    • Euh... ouais.
    • T'en penses quoi, toi ?
    • Pas grand chose. C'est pas chouette, mais peut-être qu'il y a une explication rationnelle.
    • Comme ?
    • Sais pas, faut demander à un scientifique.
    • Ça me rassure vraiment pas... Si ma mère m'avait pas demandé de chercher le pain, je serais pas sortie.
Ça me fait penser à une situation de Sarantu, et à une réplique de Faclastu. Je lui vole pour l'occasion.
    • Tu veux que je te raccompagne jusque chez toi ?
Elle me regarde, l'air surpris. Bon sang, quels yeux... Puis elle enchaîne les mots, visiblement gênée. Encore inanimé par l'effet de son regard, je zappe ce qu'elle dit, mais je réponds.
    • Alors c'est d'accord. C'est loin d'ici ?
    • Pas du tout. »

Nous continuons le dialogue en marchant. Je scrute les alentours, espérant ne trouver aucun Migono Noir, car j'aurais vraiment du mal à expliquer la situation à Blanche. Nous reparlons du concert de l'artiste auquel elle m'a invité, dont je n'ai toujours pas retenu le nom, si ce n'est qu'il ferait gagner n'importe quelle partie de Scrabble, même avec des lettres pourries. Ayant lieu la semaine prochaine, elle m'a prêté son dernier album en CD. J'ai pu réquisitionner le matériel audio de Marc pour lui accorder une heure. C'est vrai que c'est plutôt chouette, et les pistes sont plutôt dynamiques malgré le calme des mélodies. Hâte de voir ce que ça donne en direct, en vrai, avec elle...
Nous arrivons devant sa maison.
« Bien, on est arrivé.
    • Déjà ? C'est passé vite...
    • On a quand même marché une bonne demi-heure !
    • Ah... Bah, une demi-heure, ça passe vite.
    • Hi hi ! »
Elle me regarde, je la regarde, elle me sourit, je lui souris, nos sourires deviennent gênés. La situation se tend. Mon rythme cardiaque s'accélère, je déglutis, elle déglutit. Nos visages se rapprochent. Je vois Sarantu se battre péniblement avec un Migono dans la rue d'à côté. Nos visages sont toujours plus proches, elle ferme les yeux...

''Je vois Sarantu se battre péniblement avec un Migono dans la rue d'à côté.'' ?

Le temps paraît s'arrêter. Voilà une situation plutôt inconfortable. Un dilemme s'impose. Dois-je abandonner mes lèvres à celles de Blanche, pour que nous échangions un baiser langoureux à en perdre haleine, comme la situation le laisse pressentir, et ainsi terminer ma formation, devenir quelqu'un et enfin trouver l'amour ; où dois-je aller porter secours à mon mentor, qui m'a tant aidé depuis des semaines, qui a permis que ce genre de situation se produise, et qui aura sans doute encore voulu m'espionner discrètement, mais aura croisé le chemin d'une de ces pourritures d'armures orangées ? Dois-je laisser celui m'ayant tout appris courir à sa perte, où dois-je abandonner l'amour de ma vie au moment où je peux le séduire ?

« J-j-j-je p-p-peux p-pas.
Je n'avais pas mieux comme réponse sur le coup.
    • Je comprends, il te faut plus de temps.
    • P-Pardon, … mille pardons.
    • C'est pas grave. Allez, à la prochaine ! »
J'ai été minable, mais elle est rentrée chez elle. D'un côté, j'étais trop paniqué pour l'embrasser. Cela me donne finalement une solution au dilemme. J'enfile mon armure et me précipite vers le chevalier.
Le Migono me voit arriver, mon mentor aussi. Mais l'orange réagit plus vite que le vert et empoigne ce dernier avec ses... pinces ?
« Ha ! Tu arrives trop tard, Mikava. Ton supérieur s'est fait pincer ! HA HA HA ! »
Je n'avais même pas fait attention au nom du Migono affiché sur ma visière, mais je l'ai déduit à la qualité de l'humour de son porteur. Vraisemblablement, les mains qu'il a perdu récemment ont déjà été remplacées par quelque chose de plus anarchique. Le style de ces prothèses correspond au stéréotype de la pince qu'on se fait en voyant un méchant peu crédible au cinéma. À voir la manière dont Sarantu se débat, l'emprise paraît réelle. Le choc a fait tomber la lame de mon mentor, et ses poings et pieds paraissent affaiblis. Alors que je charge, Perebro s'enfuit à nouveau vers Obero, emportant son otage avec lui. J'arrive trop tard pour prendre le même chemin.
Je laisse s'échapper un ''Et merde !'' retentissant sur le coup des nerfs. Sarantu a été fait prisonnier sur Obero.

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